La loi Jardé et les RIPH : en quoi les industries pharmaceutiques sont-elles concernées ?
La recherche médicale est essentielle pour le développement de nouveaux traitements et pour l’amélioration des soins de santé.
En France, cette recherche est régie par des dispositions strictes visant à protéger les participants et à garantir l’intégrité de la personne humaine. La loi Jardé, adoptée en mars 2012 et appliquée depuis novembre 2016, est le cadre juridique pour les recherches impliquant les personnes humaines (RIPH).
Rappelons que les médicaments faisant l’objet d’essais cliniques sont encadrés d’abord par le règlement (UE) 536/2014 sur les essais cliniques (CTR), entré en vigueur le 31 janvier 2022. Il remplace la directive 2001/20/CE. Pour rappel, tout essai clinique qui dispose d’au moins un site investigateur encore actif en France au 31 janvier 2025 doit faire l’objet d’une demande de transition sur CTIS par son promoteur avant cette date. Pour les essais cliniques sur le médicament, la loi Jardé apporte des requis additionnels à prendre en considération. D’autres dispositions sont à intégrer, telles que les démarches CNIL (RGPD, et les démarches relatives à l’utilisation de médicaments composés en tout ou partie d’organismes génétiquement modifiés (OGM).
Selon que la recherche porte sur un médicament ou sur un autre produit de santé, tel que les dispositifs médicaux (investigation clinique) et DMDIV (étude de performance), les préparations de thérapie cellulaire, les tissus, les organes, les produits sanguins labiles (PSL, mais aussi les recherches portant sur les compléments alimentaires ou les cosmétiques par exemple, les dispositions à appliquer varient.
Qu’est-ce que la loi Jardé ?
La loi Jardé, nommée d’après le député Olivier Jardé, est un texte qui encadre les conditions dans lesquelles des recherches impliquant des participants humains peuvent être menées. Elle remplace la loi Huriet-Sérusclat de 1988 et vise à renforcer la protection des participants tout en facilitant la conduite des recherches cliniques.
Les principaux textes de référence incluent ainsi :
- La loi Jardé, loi n° 2012-300 du 5 mars 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine.
- L’ordonnance, dite « loi Jardé modifiée », relative aux recherches impliquant la personne humaine.
- Le décret n° 2016-1537 du 16 novembre 2016 relatif aux recherches impliquant la personne humaine.
- Le code de la santé publique (articles L1121-1 à L1126-11), qui détaille les obligations spécifiques aux différentes catégories de recherches.
Classification des RIPH
Les recherches organisées et pratiquées sur l’être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales sont désignées par les termes « recherche impliquant la personne humaine ».
Il existe trois types de RIPH :
Catégorie | Dispositions légales | Cadre |
Catégorie 1 : Recherches interventionnelles comportant un risque pour les participants | Articles L1121-1 et L1121-3 du CSP | Ces recherches nécessitent une autorisation préalable de l’ANSM et un avis favorable d’un Comité de Protection des Personnes (CPP). |
Catégorie 2 : Recherches interventionnelles avec des risques et des contraintes minimes | Article L1121-2 du CSP | Elles requièrent un avis favorable d’un CPP, mais pas d’autorisation de l’ANSM. |
Catégorie 3 : Recherches non interventionnelles | Article L1121-1-1 du CSP | Elles impliquent des études observationnelles où les risques sont absents ou négligeables. Un avis favorable d’un CPP est nécessaire, mais ces recherches ne nécessitent pas d’autorisation de l’ANSM. |
Quelles conséquences pour les industriels ?
Information des participants
L’objectif de la loi Jardé est de garantir la sécurité des participants. Une attention toute particulière est portée sur les notions de consentement éclairé et d’information claire.
Les industriels doivent s’assurer que les participants comprennent bien les enjeux, les procédures, les risques et les bénéfices potentiels de l’étude. Ces exigences sont détaillées dans les articles L1122-1-1 à L1122-2 du CSP.
Information de l’ANSM
Les industriels doivent déterminer la catégorie de leur recherche dès la phase de conception et s’assurer qu’ils obtiennent les autorisations nécessaires. Notamment, pour les RIPH portant sur le médicament, ils ne peuvent être classés en tant que RIPH 2. Un arrêté donne les critères à respecter pour rester dans le champ des RIPH 2. Pour les RIPH de catégorie 1, cela implique de soumettre un dossier complet à l’ANSM et d’obtenir un avis favorable d’un CPP (article L1121-4 du CSP). Depuis 2022, pour les essais cliniques sur le médicament, le CTR demande de passer par la plateforme CTIS.
La bonne classification de votre RIPH est le préalable à toute démarche.
Interactions avec les CPP et l’ANSM
Les CPP sont les comités d’éthique français. Les relations avec les CPP et l’ANSM sont essentielles pour la validation des projets de recherche. Une bonne communication et une soumission de dossiers complets sont nécessaires, conformément aux articles L1123-6 et L1123-7 du Code de la Santé Publique.
Démarches et procédures
Préalablement au dépôt du dossier de demande d’autorisation (autorisation initiale et modification substantielle) et/ou d’avis de recherche impliquant la personne humaine, ou de recherche de soins courants, les promoteurs doivent obtenir un numéro d’enregistrement IDRCB de la recherche. Ce numéro permet d’identifier chaque recherche réalisée en France. Pour une demande d’autorisation et d’avis de recherche biomédicale portant sur un médicament à usage humain, les promoteurs doivent obtenir un numéro d’enregistrement de la recherche dans la base de données européenne CTIS (auparavant : EudraCT).
Ensuite, les promoteurs adresseront le dossier de demande d’autorisation de recherche biomédicale et/ou d’avis, par voie électronique, à l’ANSM et/ou au CPP et, conformément aux arrêtés en vigueur fixant les formats de dossier propre à chaque type de recherche. Différents « Avis aux promoteurs » encadrent ces démarches selon la situation.
Conclusion
La loi Jardé assure ainsi la sécurité des participants aux recherches cliniques en France.
Pour les industriels de santé, comprendre et respecter ces règlementations est non seulement une obligation légale, mais aussi un gage de qualité des données générées en vue notamment de leur utilisation dans un dossier d’AMM.
En intégrant les exigences de la loi Jardé dans leurs processus, les industriels contribuent au développement de traitements innovants tout en garantissant des standards éthiques élevés, conformément aux exigences françaises sur ce sujet.
Atessia peut vous accompagner dans la mise en œuvre de ces process avec son expertise sur les essais cliniques
Article rédigé par Zarine RAMJAUNY, Consultante Juridique